The Project Gutenberg EBook of Les Bourgeois de Witzheim, by André Maurois

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Title: Les Bourgeois de Witzheim

Author: André Maurois

Illustrator: Paul Welsch

Release Date: February 11, 2020 [EBook #61373]

Language: French

Character set encoding: UTF-8

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LES BOURGEOIS

DE

WITZHEIM

PAR

ANDRÉ MAUROIS

ILLUSTRATIONS DE PAUL WELSCH

PARIS

BERNARD GRASSET, ÉDITEUR

61, rue des Saints-Pères, 61

I

J'aime le français tel qu'on le parle à Witzheim, avec un accent gras et savoureux comme la cuisine du pays, mais le patois alsacien a bien aussi son charme bourru.

C'est un langage honnête et solide, tout plein d'une sorte d'humour rustique. La solennité de la phrase allemande, si rigide dans sa charpente, fait place ici à la bonhomie de grognements familiers.

L'Allemand dit: Ia; l'Alsacien dit: Iô. Ia est net, tranchant, affirmatif; Iô est traînant, ironique, dubitatif. Tout est là, et vous pouvez aller de Bischwiller à Mulhouse si vous prononcez Iô comme il faut.

Les mots français, semés dans la phrase alsacienne comme des truffes dans un pâté, retrouvent parfois dans ce terrain nouveau un parfum évaporé. Alors que chez nous: «Nom d'une pipe» est sans force, le «Nundepip» de mon ami Deck est encore un brillant juron.

Sur la place d'armes de Witzheim, entre le restaurant «Au Canon» et le restaurant «Au Saumon», je sonne à la porte de sa maison enveloppée d'un toit en pèlerine et coiffée de tuiles imbriquées que percent des mansardes en gradins:

Nundepip! s'écrie-t-il en m'apercevant... Joséphine!... Süzele!... Wos e surprise!

II

Dans le salon de Mme Deck, aucun meuble n'a changé de place depuis le traité de Francfort. Les fauteuils et les tentures sont du Second Empire le plus pur. Au mur deux gravures naïves montrent Bonaparte au pont d'Arcole et Napoléon à Eylau. La médaille de Sainte-Hélène surmonte le congé du grand-père. Avec elle est encadré le ruban d'Italie de l'oncle Deck qui refusa d'acheter un remplaçant. Sur une console, deux statuettes en bonnet à poil veillent un casque de cuirassier ramassé à Reichoffen.

Je dis à mon ami Deck.

—Ils ont du cran, tes grenadiers.

—Iô!... répond-il... des bibelots!

Car M. Deck, en bon Alsacien, raille ses sentiments les plus vifs. De race forte et militaire, il aime les soldats et la gloire. Vivant malgré lui une histoire étrangère, il s'est attaché à des souvenirs que rien ne venait effacer. La fidélité alsacienne se cramponnait alors à l'image d'une France un peu désuète. Ici les vétérans ont conservé leur uniforme, les pompiers leur plumet rouge, et le langage des archaïsmes.

—Quel est le régiment français entré le premier à Witzheim?

—Le cent soixante toûssième te ligne, a répondu fièrement M. Deck.

III

Bien qu'il soit dix heures du matin, Joséphine apporte la tarte aux quetsches. Cinq ans de guerre ne m'ont pas fait oublier ce que Mme Deck appelle un petit morceau et j'observe depuis huit jours un demi-jeûne préparatoire.

Qui n'a pas vécu en Alsace pendant la saison des quetsches ignore les plaisirs du goût. Les fruits sont serrés comme les tuiles du toit; le jus sucré garde cependant encore une nuance d'âpreté qui le relève; la tarte immense est le symbole même de l'abondance heureuse.

Tout en savourant, j'interroge.

—Comme vous avez dû souffrir?

—Iô! souffrir!... On sait s'arranger... Ce qui a été dur, c'est le début... quand on les croyait victorieux... Ah! nundepip!

—Süzele, intervient Mme Deck, raconte voir un peu papa et les cloches.

Et Suzanne raconte son père et les cloches.

—Pendant le mois d'août 1914, presque tous les jours à midi, les cloches de l'église carillonnaient. La première fois on ne savait pas, et papa est sorti pour voir. Il a trouvé dans la rue tous les Allemands, toutes ces dames et filles d'officiers, tous pomponnés et radieux qui agitaient des drapeaux pour leur victoire de Sarrebourg. Papa est rentré en serrant les poings, la figure rouge.

Le lendemain à midi: les cloches. Papa s'est levé, a empoigné une chaise, et l'a brisée contre le mur. Cinq minutes plus tard l'agent de police frappait au carreau et demandait pourquoi nous n'avions pas sorti le drapeau. J'ai répondu que nous n'en avions pas. Il a ordonné d'en acheter un.

A la «victoire» suivante nous arborions le drapeau alsacien blanc et rouge. Le directeur du gymnase de garçons, un Allemand, est venu nous menacer. Papa est descendu à la cave pour ne plus entendre les cloches, mais le son arrivait jusque-là.

Alors quand un employé de chemin de fer nous a un matin appris Charleroi, papa a dit: «Moi, je ne peux plus. Ils vont encore sonner à midi: je vais à la campagne jusqu'au soir.» Il est parti; il a traversé toute la grande forêt, et il est monté jusqu'au sommet du Walburg. Et comme il s'asseyait, sur l'herbe, les cloches de Woerth se sont mises à sonner dans la vallée; celles de Witzheim ont répondu, puis celles de Lensbach, puis celles de Matstall, et, comme le vent portait de ce côté, papa, du haut de sa montagne, a pu entendre carillonner toutes les cloches de la basse Alsace.

—Oui, dit M. Deck, et c'était ma foi tellement bête d'être monté si haut pour ça que je n'ai pas pu m'empêcher de rire et que depuis ce jour-là j'ai supporté les «victoires» avec résignation. D'ailleurs la Marne est arrivée.

Après cela, quand le branle-bas commençait, les Alsaciens sortaient comme les autres dans les rues. Ils s'abordaient en se disant tout bas:

«Entends-tu comme on sonne le glas?»

Sur le visage il fallait l'air content pour ne pas être dénoncé, mais on se distinguait encore en ayant l'air trop content. On riait avec bruit, et les Allemands, qui se croient toujours mystifiés, disaient: «Qu'est-ce qu'ils sont encore à se moquer de nous, ces Welches?

Quand ils affichaient cent mille prisonniers, devant les dépêches on feignait l'admiration: «Croyez-vous? Ces Allemands! Encore cent mille! Où vont-ils les mettre? Et le Roth Sepel répondait: «Dans les journaux.»

Si les gamins s'ennuyaient, ils allaient sous les fenêtres de M. le Directeur Kruspe crier: «Extrablatt! Extrablatt! 10.000 canons!» Les volets s'ouvraient et le Herr Direktor congestionné hélait un vendeur invisible.

—En ce temps-là déjà, reprend Suzanne, la sœur Jules consolait maman qui ne voyait pas comment les Français seraient vainqueurs: «Il ny a pas de comment, madame Deck... Un matin quand on se réveillera, les Français seront là et les autres seront partis.» Ce qui est curieux, c'est que cela a été comme ça.

IV

Mme Deck me demande la permission d'aller s'occuper du déjeuner; Deck veut sortir pour inviter son ami Roth et M. Tubinger, professeur. On laisse à Suzanne le soin de me distraire.

—Süzele, pendant ce temps-là, raconte voir un peu Bergmann et les draps.

Et Suzanne raconte Bergmann et les draps.

—Avant la guerre, nous avions en garnison à Witzheim un régiment de dragons badois. Les officiers étaient tous de ces agrariens vaniteux, pour lesquels l'homme commence au lieutenant. Papa m'aurait giflée si j'avais parlé à l'un d'eux, mais il tolérait Bergmann.

C'était un capitaine, très intelligent, qui, étant resté à Witzheim pendant quinze ans, s'y était fait respecter. Il connaissait Paris et Londres, l'Amérique et le Japon, et les voyages lui avaient fait voir qu'il n'y a pas au monde que des Allemands.

Il avait fait la conquête de papa en lui parlant patois, et celle de maman en faisant l'éloge de la cuisine alsacienne.

—Et toi, Süzele, me disait-il, épouserais-tu un Allemand?

—Jamais de la vie, monsieur le capitaine.

—Ah! petite Welche, tu y viendras.

Pendant la guerre, on le revit deux ou trois fois, quand il venait en permission. Il avait toujours une bonne parole pour les Français: il les trouvait courageux. Il écrivit une fois pour donner des nouvelles de parents à nous qu'il avait protégés près de Lille. Puis on l'oublia.

Huit jours avant l'armistice, dans chaque maison, en grand mystère, on se préparait. On découpait des cocardes tricolores; on apprenait la Marseillaise aux enfants, et, pour en faire des drapeaux, on taillait dans les draps de lit. J'avais obtenu de maman son plus grand drap que j'avais coupé en trois morceaux, et j'avais acheté du bleu et du rouge pour les teindre, dans ma cuvette.

Ma teinture avait très bien pris, et le lendemain soir, j'étais assise sur mon lit en train de coudre mon drapeau, quand j'entendis dans la rue un bruit de pas et presque tout de suite maman frappa à ma porte et me dit:

—Süzele, c'est le capitaine Bergmann qui revient, et qui cherche une chambre pour la nuit.

J'ai voulu cacher mon travail, mais maman avait ouvert trop vite, et Bergmann, qui était derrière elle, regardait mon drapeau bleu blanc rouge.

J'ai cru que mon cœur s'arrêterait tant j'ai eu peur. Car il était là avec ses hommes, les Français étaient encore loin, et Dieu sait ce qu'il aurait pu faire.

Mais il est devenu tout blanc lui aussi; il a dit d'une voix lente et triste:

—Ah oui! C'est donc comme cela maintenant?

Il a salué et il est sorti.

V

M. Deck revient avec ses invités: il me présente M. Tubinger, professeur, et Roth Sepel, qui est Directeur de la musique des pompiers.

Roth est son meilleur ami: quand l'un dit blanc, l'autre dit noir; l'un est catholique, l'autre est protestant; l'un est libéral, l'autre est radical; quand l'un est absent, l'autre est malheureux.

Joséphine apporte aussitôt un plat de foies gras chauds en sauce, Deck débouche ce Riquevihr qui est le Clos-Vougeot de l'Alsace, et M. Tubinger dogmatise.

—Cette façon de servir le foie d'oie est dans la vraie tradition alsacienne: le pâté est une invention assez moderne, faite par un Normand nommé Close, qui vint à Strasbourg comme chef de M. le Maréchal de Contades. Quand le maréchal quitta l'Alsace, ce Close épousa une pâtissière de la rue de la Mésange et fabriqua les premières terrines.

—Malheureusement, soupire Mme Deck, les foies sont très rares cette année: on faisait venir beaucoup d'oies de Russie et la Révolution empêche le commerce. Cependant les Allemands ont inventé une machine à gaver qui rend l'élevage plus facile.

—Ah! dit Roth: ils sont ingénieux...

—Iô, dit Deck, ingénieux! Ce n'était pas difficile à trouver.

—Écoute Joseph, dit Mme Deck, il faut reconnaître ce qui est: tu dis toi-même que dans les chemins de fer et les postes...

—Ça, on ne peut pas dire le contraire dit Deck: quand on voulait un renseignement, on n'avait pas besoin de courir de bureau en bureau.

—On ne peut nier, dit M. Tubinger, leur générosité pour les écoles... Ah! c'est une sale race.

—Une sale race, approuvent Deck et Roth avec un ensemble inattendu.

Je me permets de demander par quelle nuance de sentiment ils choisissent, pour les maudire, le moment où ils viennent de reconnaître certaines vertus à nos ennemis.

—Vous autres, Français de l'intérieur, dit M. Deck, vous ne comprendrez jamais rien aux Allemands.

Tenez, en ce moment, vous les conservez dans beaucoup d'administrations. Ils y sont très polis, très dévoués. Ils observent les règlements avec une conscience admirable.

Voyez celui qui donne encore aujourd'hui les billets à la gare de Witzheim. Il fait et refait le compte de chaque voyageur: «Funf und zwanzig... und acht und dreissig... und neun und neunzig».

Maintenant le supplément de guerre: «Zwei und fünfzig...» Et le supplément de Schnellzug: «Acht und dreissig». Il additionne, multiplie, recommence, ouvre des livres, consulte ses camarades; par moments un vrai Soviet examine vos trois billets.

Ah! qu'ils se donnent du mal! Ils s'en donnent tellement qu'une douzaine de bons Alsaciens manque chaque matin le train de Strasbourg.

Le soir l'Allemand les rencontre à la brasserie et les plaint: «Cette administration française! Si compliquée!»

Évidemment, c'est l'administration française, qui a inventé le Zuschlag et le Schnelzug... C'est elle qui a forcé le chef de gare allemand de Niederhausen à arrêter le train une heure par suite d'une erreur, bien involontaire, de signaux...

—Mais enfin monsieur Deck, que voulez-vous que nous fassions d'eux? Pouvons-nous expulser trois cents mille personnes? Nous ne saurions comment les remplacer.

—Nous ne demandons pas qu'on les expulse, mais nundepip, ne les mettez pas dans des postes où ils peuvent entraver la bonne marche des services.

—Et surtout, dit M. Roth, que l'Alsacien soit toujours bien au-dessus de l'Allemand: en ce moment il y a des administrations qui font examiner les compétences techniques des Alsaciens par des Allemands: ça ne peut pas aller.

—Enfin, monsieur Roth, nous les assimilerons.

—Iô!... Assimiler!... Un Allemand est toujours un Allemand.

VI

Joséphine apporte un cuissot de chevreuil et le Riquevihr circule à nouveau.

—Süzele, dit Mme Deck, raconte voir un peu Plashke et sa femme.

Et Suzanne raconte Plashke et sa femme.

—Lui est né en Alsace, de parents Allemands: il a la carte B. Elle est une Badoise authentique. Au temps des Allemands, Plashke était un grand homme. Inspecteur pour la Basse-Alsace d'une compagnie d'assurances de Berlin, il recevait beaucoup. Des officiers venaient prendre le thé chez lui et les médecins militaires ont trouvé ce thé si bon, qu'au moment de la mobilisation Herr Plashke s'est trouvé malade. Il s'est dévoué pour les blessés et a été proposé pour l'Aigle rouge de quatrième classe.

Vers le mois d'août 1918, Frau Plashke, une personne énergique, a commencé à apprendre le Français. Herr Plashke est venu demander à papa les noms des meilleures Compagnies d'Assurances françaises. Quand le 172e de ligne est entré, ils ont sorti un drapeau français. Maintenant Plashke est inspecteur pour la Basse-Alsace d'une grande Compagnie d'Assurances de Paris. L'autre jour, Frau Plashke est venue nous faire une visite et, croyez-moi, son accent français est meilleur que le nôtre. Sa grande ambition, dit-elle, est que sa fille épouse un officier français. Ils sont déjà nombreux à ses thés. Quant à Herr Plashke, ayant raté son Aigle rouge, il voudrait les palmes académiques. Il les aura.

—Oui, dit Roth, peut-être même avant le Directeur de la musique des pompiers.

—Les palmes académiques! Vous ne direz pas que celui-là n'est pas assimilé.

—Iô!... Assimilé!... dit M. Deck, Inspecteur d'assurances, voilà ce qu'il est.

VII

L'autre jour, dit Roth, j'avais été convoqué à une réunion de commerçants alsaciens... Iô! alsaciens!..Plus de la moitié de la salle était allemande. Enfin je me suis assis et j'ai écouté. Mais quand j'ai entendu des messieurs de Darmstadt et de Kœnigsberg parler de leur patriotisme, j'ai aussi voulu dire un mot.

—Messieurs, je ne veux nommer personne, mais comment s'appelait le père de la jeune fille qui a embrassé un lieutenant allemand sur la place d'Armes de Witzheim le jour de la prise de Douaumont par les fidèles Brandebourgeois?... Encore une fois je ne nomme personne, mais s'il y a quelqu'un que ça démange, il peut cependant se gratter.

Un certain nombre de ces messieurs se sont regardés et les vieux Alsaciens qui comme moi, s'étaient galvaudés là-dedans se sont mis à rire.

—Je ne veux toujours pas faire de personnalités, ai-je continué, mais qui a fait afficher en 1916 à la porte de sa boutique que le montant total des achats de la semaine irait à l'emprunt de guerre allemand? Je ne nomme personne, mais s'il y a ici quelqu'un qui vient de prendre une prise, qu'il éternue.

—Assez... Silence... m'a crié le banquier Schumann.

—Wos? Silence?... C'est ici la République Française... Liberté, Egalité... et si M. le Grand Lama n'est pas content, il a droit à un billet pour l'autre côté du Rhin et à cinquante kilos de bagages... Ce sera cinquante de plus qu'il n'en avait en arrivant.

—Tenez, m'a dit M. Tubinger, vous tenez-là une des clefs de nos sentiments à leur égard. Quand ces gens-là nous ont envahi, après 70, leur misère grossière, leur avarice ont choqué même nos paysans. Nous ne sommes pas des délicats, mais nous savons ce qui est bon. Nous avons senti que nous appartenions à une civilisation plus ancienne que la leur. On peut dire que c'est là un orgueil assez vain; on peut dire que la jeunesse est un beau défaut et que souvent dans l'histoire du monde des races barbares ont subjugué des empires plus affinés, mais vous n'empêcherez pas qu'à nos yeux, avec toute sa puissance industrielle, l'Allemand sera toujours un parvenu.

—Comment? appuie M. Roth, des gens qui sont venus ici avec une chemise dans le coin de leur mouchoir! Et ils voulaient faire les messieurs du monde. Ça ne pouvait pas aller!... Ces gens-là, ils sont très bien chez eux. Quand je vais en Allemagne je veux bien admirer leurs usines et leurs banques. Car ils travaillent, vous savez, ces Allemands: ils travaillent plus que vous et que nous... Mais quand je suis ici en Alsace, je veux être chez moi: voilà.

—Iô, dit Deck, en voilà des phrases: nous aimons les Français parce que nous sommes Français, et nous n'aimons pas les Allemands parce que nous ne sommes pas Allemands... Et ça suffit... Joséphine, ma fille, repassez le chevreuil, au lieu de m'écouter la bouche ouverte... Cette Joséphine, encore une qui m'a fait une belle peur le jour où la dernière brigade allemande a traversé Witzheim. Nous étions aux fenêtres et, au moment où le général passait, notre cheval s'est mis à hennir dans l'écurie: «Herr Deck! Herr Deck, m'a crié Joséphine, les chevaux eux-mêmes rient de les voir partir!» Le général a regardé en l'air...

VIII

—Si on pouvait aussi leur dire pendant la guerre ce qu'on pensait? Cela dépendait. Si on avait la réputation d'être un homme à bons mots, on pouvait dire beaucoup de choses.

Ainsi, moi Roth, j'avais mon franc parler, parce que je passais auprès d'eux pour un cerveau un peu brûlé... Si Deck ou Tubinger avaient dit la moitié de ce que je racontais, le Kreisdirektor les aurait fait coffrer, mais moi, il disait: «Ce n'est rien: c'est le Sepel!» Et ça passait.

J'ai longtemps logé dans ma maison un colonel, un Oberst, qui n'était pas un mauvais bougre. Il était fixé sur mes sentiments depuis le jour où il m'avait demandé:

—Eh bien, Herr Roth, quand tombera Verdun?

—Verdun ne tombera jamais, Herr Oberst, avais-je répondu avant d'avoir eu le temps de savoir ce que je disais.

Il ne m'en voulait pas trop: il essayait de me convertir.

—Que vous pensiez en Français, me disait-il, je l'admets encore: vous êtes né avant la conquête. Mais enfin pourquoi les Français, et les Russes, et les Italiens sont-ils assez bêtes pour «danser comme le fifre de l'Angleterre»? C'est pour elle seule que vous travaillez et que vos jeunes gens se font tuer.

—Herr Oberst, lui ai-je répondu, je ne sais pas si vous avez entendu parler d'un temps, encore pas très lointain, où l'Autriche, la Russie, et si j'ai bonne mémoire, la Prusse, dansaient assez volontiers comme le fifre de l'Angleterre. Pourquoi écoutaient-ils sa musique? Parce qu'il y avait alors en France un certain empereur très dangereux pour la paix du monde et quelles avaient besoin de l'Angleterre pour l'abattre: Herr Oberst, concluez vous-même.

—Et il tolérait ça?

—Iô... Tolérer... Il remerciait par-dessus le marché... Vous ne connaissez pas les Allemands. C'est quand on parle fort qu'ils sont polis.

—Les Alsaciens, dit M. Deck, avaient toujours le dernier mot. Tenez, un jour les Allemands avaient organisé une tournée de journalistes neutres en Alsace pour leur faire constater à quel point nous étions attachés à la patrie allemande.

Dans chaque ville la propagande germanique offrait un banquet aux gens du pays et les neutres pouvaient interroger librement tous les convives.

Vous pensez bien que lorsqu'ils sont venus ici le Kreisdirektor ne nous avait pas invités, ni moi ni Roth ni Tubinger. En ce temps-là nous passions notre temps à nous promener dans les récoltes et quand elles étaient bien mauvaises, les épis bien pauvres, les chaumes bien couchés par la grêle, nous nous réjouissions en pensant aux greniers qui se vidaient.

Les neutres banquetaient donc «Au Canon» et tout allait bien, car les convives avaient été choisis, quand un sacré Suédois s'avisa d'interroger Hauser, l'aubergiste, un vrai alsacien d'Alsace.

—Et vous, mon brave, lui dit-il, êtes-vous heureux sous le régime allemand ou souhaitez-vous le retour à la France?

Hauser, étonné, le regardait sans rien dire.

—Allons, cria le Kreisdirektor rageur, répondez! Répondez librement.

Il paraît en effet qu'il était surprenant de voir ce qu'il y avait à ce moment de libéralisme dans son regard.

Hauser ne voulait pas d'histoires: ce n'est pas possible pour un aubergiste. Il ne voulait pas non plus renier la France. Mais il n'est pas embarrassé.

—Herr Kreis Direktor, a-t-il dit lentement, moi, quand je veux me confesser, je vais à l'église.

IX

Un plat de cèpes vient m'achever: le professeur explique que ce légume a été négligé par les Alsaciens jusqu'à l'arrivée de Stanislas, roi de Pologne, qui leur en révéla l'usage, et M. Roth me raconte l'arrivée des Français à Witzheim:

—C'était quelque chosse de vraiment bien... On avait décoré la rue du Marché d'un arc de triomphe avec une inscription: Salut à nos frères! J'avais appris la Marseillaise à la musique des pompiers et aux enfants des écoles. Tous les vétérans étaient là, avec leurs médailles et leurs cylindres...

—Wos? Cylindres? interrompt Deck... En français on dit gibus.

—Pour moi, dit Mme Deck timidement, cela a été comme le jour de mon mariage: un instant pour lequel il semble qu'on ait vécu toute sa vie. Quand ces soldats bleus ont défilé, quand ces clairons ont joué, j'ai cru encore avoir dix-huit ans.

Elle s'arrête, rougit et continue:

—Seulement, que voulez-vous, c'est comme dans tous les mariages. Après les premiers jours on s'aperçoit que le mari n'est pas tout à fait aussi parfait que le fiancé.

—Comment? s'indigne son mari... Wos? Ça, c'est un peu fort: dies isch dort zu aehrik.

Madame se défend, éplorée:

—Écoute, Joseph, on s'habitue vite aux défauts... on finit même par ne plus pouvoir s'en passer... mais enfin on a un homme, on n'a plus un rêve.

Je murmure, pour M. Tubinger:

—«Il peut y avoir de bons mariages: il n'y en a pas de délicieux».

—Très juste, dit-il. Pendant quarante-huit ans, la France a été pour nous une idole. Pour beaucoup d'entre nous, l'arrivée des Français devait marquer le début de l'âge d'or.

«Les Français, me disait le vieux savetier Jacob, les Français... ça veut dire du vin rouge et jamais de travail.» Un autre prédisait: «Ils installeront un tonneau sur la grand'place et tout le monde pourra boire pour rien.»

Le plus drôle c'est que tout arriva ainsi. Les poilus avaient du vin en abondance et le distribuaient généreusement. Après le départ des autres, maigres et affamés, cela parut miraculeux. Pendant un mois l'Alsace devint un pays de Cocagne: ce n'étaient que banquets et danses. Mais c'est un régime difficile à prolonger. Bien que les Français soient revenus, il faut encore travailler pour vivre: cela surprend.

J'ai rencontré ce matin le savetier Jacob; je lui ai dit: «Jacob, quand vas-tu t'y remettre?» Et Jacob m'a répondu: «Quand nous aurons une garnison à demeure.»

X

Il est quatre heures: on sort de table, et Deck, qui fabrique quelque chose, va faire un tour dans son usine. En l'attendant je déguste son kirsch et M. Tubinger m'instruit.

—Vous nous trouverez un peu grinchus; c'est pour vous que nous le sommes devenus. Trop bien séparés de vous pour partager votre vie, nous avons vécu pendant quarante-huit ans dans une retraite volontaire.

Vous nous trouverez puritains: il fallait l'être ou céder. Pour conserver les mœurs françaises, nous avons tenu nos jeunes filles enfermées et inaccessibles. Cette jeune Suzanne que vous voyez n'a jamais été dans un théâtre: c'est qu'on y jouait en allemand. Dépouillés par la défaite du droit de nous gouverner, nous nous sommes ankylosés dans l'attitude du spectateur sarcastique. La critique est devenue pour nous une habitude de l'esprit. Nous nous considérons comme des êtres un peu différents de tous les autres.

—Et alors, Monsieur Tubinger?

—D'abord et avant tout, liberté! L'Alsacien aime qu'on le laisse tranquille. Il y a une chanson là-dessus:

Ce qu'il a, il ne le veut pas,
Et ce qu'il veut, il ne l'a pas...

Dites-lui que les lois françaises ne s'appliqueront pas à l'Alsace, et il en réclamera l'application. Dites-lui de parler alsacien tout son saoûl, et il parlera français. Le patois, monsieur, voilà la grande question. Il y a deux façons de gouverner l'Alsace: celle de Saint-Just qui voulait transplanter sa population en Champagne pour lui faire apprendre le français et qui ne comprenait pas qu'un paysan pût avoir un beau gilet rouge. Et celle de Napoléon qui disait: «Laissez à ces braves gens leur dialecte: ils sabreront toujours en Français».

Ne parlez jamais de franciser l'Alsace: elle est française autant que province en France. Mais elle l'est à sa manière qui n'est pas celle de la Bretagne ou de l'Artois.

Donnez les emplois à des hommes instruits de nos besoins et parlant notre langue. Envoyez-nous des gens qui nous ressemblent, des gens solides, un peu graves et qui aient bon estomac. Employez beaucoup les Alsaciens eux-mêmes.

—Voilà le grand secret, dit Roth qui écoute... Il y a dans toutes nos petites villes, et même parmi les artistes, des gens qui auraient fait d'excellents sous-préfets...

—Il est certain, dit M. Tubinger, qu'on ne comprend pas très bien pourquoi on envoie de France des directeurs d'écoles alors que parmi les professeurs... Enfin...

Quoi encore? Ne parlez pas trop d'Alsace-Lorraine: c'est une création des Allemands. Il n'y a pas d'Alsace-Lorraine. Il y a l'Alsace, et il y a la Lorraine.

—Il y a, dit Roth, qui est radical, la République Française Une et Indivisible... Département du Bas-Rhin... Et n'oubliez pas, monsieur Tubinger, de lui rappeler le principal: ...E Schwobe isch immer e Schwobe.

—C'est vrai, dit M. Tubinger. Vous en viendrez un jour à estimer certains aspects du caractère allemand: nous y sommes venus. Vous en viendrez à faire des affaires avec eux, et vous aurez raison. Mais n'oubliez jamais ce que vous dit M. Roth: un Allemand est toujours un Allemand.

XI

Deck était déjà revenu. Il dirige fort bien son affaire, mais comme on le fait en Alsace où l'on sait mêler au travail des loisirs assez bien nourris. Il serait très malheureux s'il ne pouvait aller à son usine tous les matins à sept heures; il le serait aussi s'il était privé de sa chope à la brasserie et de la promenade en ville qu'il fait tous les jours à cinq heures.

Je l'ai accompagné dans sa tournée. Par la rue du Maréchal-Foch, nous avons gagné le Pfalz, où se trouvait autrefois la caserne des dragons allemands.

En face de la caserne j'ai remarqué deux boutiques où l'on vend des cartes postales. Sur la vitrine de l'une d'elles, une large bande tricolore: «Ici, maison française; à côté, maison boche.»

La maison allemande, petite et basse, semble rentrer la tête dans les épaules et encaisse le coup sans répondre. Beaucoup de passants y arrivent avant d'avoir vu l'écriteau et elle ne fait pas de mauvaises affaires.

Comme une petite campagnarde y entrait, nous nous sommes arrêtés Deck et moi, sur le pas de la porte.

—Je n'ai plus «Vive le France!» répondait l'Allemande, mais j'ai le soldat, avec «Vive l'Alsace!»

—Non, dit la petite, je veux: «Vive le France!...» C'est plus chentil.

Nous avons continué notre promenade sous les marronniers du Pfalz et j'ai risqué:

—Un symbole?

—Iô!... m'a répondu mon ami Deck, avec un mélange assez alsacien de tendresse et d'ironie.

Strasbourg, Août 1919.






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1.A. By reading or using any part of this Project Gutenberg-tm
electronic work, you indicate that you have read, understand, agree to
and accept all the terms of this license and intellectual property
(trademark/copyright) agreement. If you do not agree to abide by all
the terms of this agreement, you must cease using and return or
destroy all copies of Project Gutenberg-tm electronic works in your
possession. If you paid a fee for obtaining a copy of or access to a
Project Gutenberg-tm electronic work and you do not agree to be bound
by the terms of this agreement, you may obtain a refund from the
person or entity to whom you paid the fee as set forth in paragraph
1.E.8.

1.B. "Project Gutenberg" is a registered trademark. It may only be
used on or associated in any way with an electronic work by people who
agree to be bound by the terms of this agreement. There are a few
things that you can do with most Project Gutenberg-tm electronic works
even without complying with the full terms of this agreement. See
paragraph 1.C below. There are a lot of things you can do with Project
Gutenberg-tm electronic works if you follow the terms of this
agreement and help preserve free future access to Project Gutenberg-tm
electronic works. See paragraph 1.E below.

1.C. The Project Gutenberg Literary Archive Foundation ("the
Foundation" or PGLAF), owns a compilation copyright in the collection
of Project Gutenberg-tm electronic works. Nearly all the individual
works in the collection are in the public domain in the United
States. If an individual work is unprotected by copyright law in the
United States and you are located in the United States, we do not
claim a right to prevent you from copying, distributing, performing,
displaying or creating derivative works based on the work as long as
all references to Project Gutenberg are removed. Of course, we hope
that you will support the Project Gutenberg-tm mission of promoting
free access to electronic works by freely sharing Project Gutenberg-tm
works in compliance with the terms of this agreement for keeping the
Project Gutenberg-tm name associated with the work. You can easily
comply with the terms of this agreement by keeping this work in the
same format with its attached full Project Gutenberg-tm License when
you share it without charge with others.

1.D. The copyright laws of the place where you are located also govern
what you can do with this work. Copyright laws in most countries are
in a constant state of change. If you are outside the United States,
check the laws of your country in addition to the terms of this
agreement before downloading, copying, displaying, performing,
distributing or creating derivative works based on this work or any
other Project Gutenberg-tm work. The Foundation makes no
representations concerning the copyright status of any work in any
country outside the United States.

1.E. Unless you have removed all references to Project Gutenberg:

1.E.1. The following sentence, with active links to, or other
immediate access to, the full Project Gutenberg-tm License must appear
prominently whenever any copy of a Project Gutenberg-tm work (any work
on which the phrase "Project Gutenberg" appears, or with which the
phrase "Project Gutenberg" is associated) is accessed, displayed,
performed, viewed, copied or distributed:

  This eBook is for the use of anyone anywhere in the United States and
  most other parts of the world at no cost and with almost no
  restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or re-use it
  under the terms of the Project Gutenberg License included with this
  eBook or online at www.gutenberg.org. If you are not located in the
  United States, you'll have to check the laws of the country where you
  are located before using this ebook.

1.E.2. If an individual Project Gutenberg-tm electronic work is
derived from texts not protected by U.S. copyright law (does not
contain a notice indicating that it is posted with permission of the
copyright holder), the work can be copied and distributed to anyone in
the United States without paying any fees or charges. If you are
redistributing or providing access to a work with the phrase "Project
Gutenberg" associated with or appearing on the work, you must comply
either with the requirements of paragraphs 1.E.1 through 1.E.7 or
obtain permission for the use of the work and the Project Gutenberg-tm
trademark as set forth in paragraphs 1.E.8 or 1.E.9.

1.E.3. If an individual Project Gutenberg-tm electronic work is posted
with the permission of the copyright holder, your use and distribution
must comply with both paragraphs 1.E.1 through 1.E.7 and any
additional terms imposed by the copyright holder. Additional terms
will be linked to the Project Gutenberg-tm License for all works
posted with the permission of the copyright holder found at the
beginning of this work.

1.E.4. Do not unlink or detach or remove the full Project Gutenberg-tm
License terms from this work, or any files containing a part of this
work or any other work associated with Project Gutenberg-tm.

1.E.5. Do not copy, display, perform, distribute or redistribute this
electronic work, or any part of this electronic work, without
prominently displaying the sentence set forth in paragraph 1.E.1 with
active links or immediate access to the full terms of the Project
Gutenberg-tm License.

1.E.6. You may convert to and distribute this work in any binary,
compressed, marked up, nonproprietary or proprietary form, including
any word processing or hypertext form. However, if you provide access
to or distribute copies of a Project Gutenberg-tm work in a format
other than "Plain Vanilla ASCII" or other format used in the official
version posted on the official Project Gutenberg-tm web site
(www.gutenberg.org), you must, at no additional cost, fee or expense
to the user, provide a copy, a means of exporting a copy, or a means
of obtaining a copy upon request, of the work in its original "Plain
Vanilla ASCII" or other form. Any alternate format must include the
full Project Gutenberg-tm License as specified in paragraph 1.E.1.

1.E.7. Do not charge a fee for access to, viewing, displaying,
performing, copying or distributing any Project Gutenberg-tm works
unless you comply with paragraph 1.E.8 or 1.E.9.

1.E.8. You may charge a reasonable fee for copies of or providing
access to or distributing Project Gutenberg-tm electronic works
provided that

* You pay a royalty fee of 20% of the gross profits you derive from
  the use of Project Gutenberg-tm works calculated using the method
  you already use to calculate your applicable taxes. The fee is owed
  to the owner of the Project Gutenberg-tm trademark, but he has
  agreed to donate royalties under this paragraph to the Project
  Gutenberg Literary Archive Foundation. Royalty payments must be paid
  within 60 days following each date on which you prepare (or are
  legally required to prepare) your periodic tax returns. Royalty
  payments should be clearly marked as such and sent to the Project
  Gutenberg Literary Archive Foundation at the address specified in
  Section 4, "Information about donations to the Project Gutenberg
  Literary Archive Foundation."

* You provide a full refund of any money paid by a user who notifies
  you in writing (or by e-mail) within 30 days of receipt that s/he
  does not agree to the terms of the full Project Gutenberg-tm
  License. You must require such a user to return or destroy all
  copies of the works possessed in a physical medium and discontinue
  all use of and all access to other copies of Project Gutenberg-tm
  works.

* You provide, in accordance with paragraph 1.F.3, a full refund of
  any money paid for a work or a replacement copy, if a defect in the
  electronic work is discovered and reported to you within 90 days of
  receipt of the work.

* You comply with all other terms of this agreement for free
  distribution of Project Gutenberg-tm works.

1.E.9. If you wish to charge a fee or distribute a Project
Gutenberg-tm electronic work or group of works on different terms than
are set forth in this agreement, you must obtain permission in writing
from both the Project Gutenberg Literary Archive Foundation and The
Project Gutenberg Trademark LLC, the owner of the Project Gutenberg-tm
trademark. Contact the Foundation as set forth in Section 3 below.

1.F.

1.F.1. Project Gutenberg volunteers and employees expend considerable
effort to identify, do copyright research on, transcribe and proofread
works not protected by U.S. copyright law in creating the Project
Gutenberg-tm collection. Despite these efforts, Project Gutenberg-tm
electronic works, and the medium on which they may be stored, may
contain "Defects," such as, but not limited to, incomplete, inaccurate
or corrupt data, transcription errors, a copyright or other
intellectual property infringement, a defective or damaged disk or
other medium, a computer virus, or computer codes that damage or
cannot be read by your equipment.

1.F.2. LIMITED WARRANTY, DISCLAIMER OF DAMAGES - Except for the "Right
of Replacement or Refund" described in paragraph 1.F.3, the Project
Gutenberg Literary Archive Foundation, the owner of the Project
Gutenberg-tm trademark, and any other party distributing a Project
Gutenberg-tm electronic work under this agreement, disclaim all
liability to you for damages, costs and expenses, including legal
fees. YOU AGREE THAT YOU HAVE NO REMEDIES FOR NEGLIGENCE, STRICT
LIABILITY, BREACH OF WARRANTY OR BREACH OF CONTRACT EXCEPT THOSE
PROVIDED IN PARAGRAPH 1.F.3. YOU AGREE THAT THE FOUNDATION, THE
TRADEMARK OWNER, AND ANY DISTRIBUTOR UNDER THIS AGREEMENT WILL NOT BE
LIABLE TO YOU FOR ACTUAL, DIRECT, INDIRECT, CONSEQUENTIAL, PUNITIVE OR
INCIDENTAL DAMAGES EVEN IF YOU GIVE NOTICE OF THE POSSIBILITY OF SUCH
DAMAGE.

1.F.3. LIMITED RIGHT OF REPLACEMENT OR REFUND - If you discover a
defect in this electronic work within 90 days of receiving it, you can
receive a refund of the money (if any) you paid for it by sending a
written explanation to the person you received the work from. If you
received the work on a physical medium, you must return the medium
with your written explanation. The person or entity that provided you
with the defective work may elect to provide a replacement copy in
lieu of a refund. If you received the work electronically, the person
or entity providing it to you may choose to give you a second
opportunity to receive the work electronically in lieu of a refund. If
the second copy is also defective, you may demand a refund in writing
without further opportunities to fix the problem.

1.F.4. Except for the limited right of replacement or refund set forth
in paragraph 1.F.3, this work is provided to you 'AS-IS', WITH NO
OTHER WARRANTIES OF ANY KIND, EXPRESS OR IMPLIED, INCLUDING BUT NOT
LIMITED TO WARRANTIES OF MERCHANTABILITY OR FITNESS FOR ANY PURPOSE.

1.F.5. Some states do not allow disclaimers of certain implied
warranties or the exclusion or limitation of certain types of
damages. If any disclaimer or limitation set forth in this agreement
violates the law of the state applicable to this agreement, the
agreement shall be interpreted to make the maximum disclaimer or
limitation permitted by the applicable state law. The invalidity or
unenforceability of any provision of this agreement shall not void the
remaining provisions.

1.F.6. INDEMNITY - You agree to indemnify and hold the Foundation, the
trademark owner, any agent or employee of the Foundation, anyone
providing copies of Project Gutenberg-tm electronic works in
accordance with this agreement, and any volunteers associated with the
production, promotion and distribution of Project Gutenberg-tm
electronic works, harmless from all liability, costs and expenses,
including legal fees, that arise directly or indirectly from any of
the following which you do or cause to occur: (a) distribution of this
or any Project Gutenberg-tm work, (b) alteration, modification, or
additions or deletions to any Project Gutenberg-tm work, and (c) any
Defect you cause.

Section 2. Information about the Mission of Project Gutenberg-tm

Project Gutenberg-tm is synonymous with the free distribution of
electronic works in formats readable by the widest variety of
computers including obsolete, old, middle-aged and new computers. It
exists because of the efforts of hundreds of volunteers and donations
from people in all walks of life.

Volunteers and financial support to provide volunteers with the
assistance they need are critical to reaching Project Gutenberg-tm's
goals and ensuring that the Project Gutenberg-tm collection will
remain freely available for generations to come. In 2001, the Project
Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure
and permanent future for Project Gutenberg-tm and future
generations. To learn more about the Project Gutenberg Literary
Archive Foundation and how your efforts and donations can help, see
Sections 3 and 4 and the Foundation information page at
www.gutenberg.org Section 3. Information about the Project Gutenberg
Literary Archive Foundation

The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit
501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the
state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal
Revenue Service. The Foundation's EIN or federal tax identification
number is 64-6221541. Contributions to the Project Gutenberg Literary
Archive Foundation are tax deductible to the full extent permitted by
U.S. federal laws and your state's laws.

The Foundation's principal office is in Fairbanks, Alaska, with the
mailing address: PO Box 750175, Fairbanks, AK 99775, but its
volunteers and employees are scattered throughout numerous
locations. Its business office is located at 809 North 1500 West, Salt
Lake City, UT 84116, (801) 596-1887. Email contact links and up to
date contact information can be found at the Foundation's web site and
official page at www.gutenberg.org/contact

For additional contact information:

    Dr. Gregory B. Newby
    Chief Executive and Director
    [email protected]

Section 4. Information about Donations to the Project Gutenberg
Literary Archive Foundation

Project Gutenberg-tm depends upon and cannot survive without wide
spread public support and donations to carry out its mission of
increasing the number of public domain and licensed works that can be
freely distributed in machine readable form accessible by the widest
array of equipment including outdated equipment. Many small donations
($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt
status with the IRS.

The Foundation is committed to complying with the laws regulating
charities and charitable donations in all 50 states of the United
States. Compliance requirements are not uniform and it takes a
considerable effort, much paperwork and many fees to meet and keep up
with these requirements. We do not solicit donations in locations
where we have not received written confirmation of compliance. To SEND
DONATIONS or determine the status of compliance for any particular
state visit www.gutenberg.org/donate

While we cannot and do not solicit contributions from states where we
have not met the solicitation requirements, we know of no prohibition
against accepting unsolicited donations from donors in such states who
approach us with offers to donate.

International donations are gratefully accepted, but we cannot make
any statements concerning tax treatment of donations received from
outside the United States. U.S. laws alone swamp our small staff.

Please check the Project Gutenberg Web pages for current donation
methods and addresses. Donations are accepted in a number of other
ways including checks, online payments and credit card donations. To
donate, please visit: www.gutenberg.org/donate

Section 5. General Information About Project Gutenberg-tm electronic works.

Professor Michael S. Hart was the originator of the Project
Gutenberg-tm concept of a library of electronic works that could be
freely shared with anyone. For forty years, he produced and
distributed Project Gutenberg-tm eBooks with only a loose network of
volunteer support.

Project Gutenberg-tm eBooks are often created from several printed
editions, all of which are confirmed as not protected by copyright in
the U.S. unless a copyright notice is included. Thus, we do not
necessarily keep eBooks in compliance with any particular paper
edition.

Most people start at our Web site which has the main PG search
facility: www.gutenberg.org

This Web site includes information about Project Gutenberg-tm,
including how to make donations to the Project Gutenberg Literary
Archive Foundation, how to help produce our new eBooks, and how to
subscribe to our email newsletter to hear about new eBooks.